Nous trouvons régulièrement dans les traductions du Qur°ân en version française :
« Et
ils suivirent ce que les diables racontent contre le règne de
Sulaymân. Alors que Sulaymân n'a jamais été mécréant mais bien les
diables : ils enseignent aux gens la magie ainsi que ce qui est descendu
aux deux anges Hârut et Mârut, à Babylone ; mais
ceux-ci n'enseignaient rien à personne, qu'ils n'aient dit d'abord :
« Nous ne sommes rien qu'une tentation : ne soit pas mécréant » ; ils
apprennent auprès d'eux ce qui sème la
désunion entre l'homme et son épouse. Or ils ne sont capables de
nuire à personne qu'avec la permission d'Allâh. Et les gens apprennent
ce qui leur nuit et ne leur est pas profitable. Et ils
savent, très certainement, que celui qui acquiert [ce pouvoir]
n'aura aucune part dans l'au-delà. Certes, quelle détestable marchandise
pour laquelle ils ont vendu leurs âmes! Si seulement ils
savaient ! »
[Sourate 2 - Verset 102]
Une
telle traduction est cependant totalement erronée au vue de la réalité
du sens de ce verset et
de la croyance des Ahl Us Sunnah concernant les Anges, ce que nous
allons démontrer au sein de cet article si Allâh le veut. Cette mauvaise
traduction est dut au fait qu'il existe une divergence
à propos de l'interprétation de ce verset entre les exégètes et que
bon nombre d'entre eux se sont contentés de rapporter des récits
non-authentiques provenant des gens du livre afin de le
commenter, notamment des juifs, qui sont réputés pour leurs
calomnies en tout genre à propos des Prophètes et des Anges (que La Paix
d'Allâh soit sur eux tous). D'ailleurs, Al Imâm Ismâ'îl Ibn
Kathîr (qu'Allâh lui fasse miséricorde) a dit dans son Bidâyah wa An Nihâyah : « De nombreux récits furent rapportés à leur sujet (Hârut et
Mârut), dont la plupart son d'origine israélite. »
Et c'est ainsi que le Qâdî 'Iyâd Ibn Mûsâ Al Mâlikî (qu'Allâh lui fasse miséricorde) a dit dans son Kitâb Ush Shifâ° :
« La
plupart des récits rapportés sur cet épisode proviennent des
livres des juifs et de leur intervention, comme Allâh le mentionne
dans le premier verset de ce récit dans lequel ils calomnient Sulaymân
et l'accusent de mécréance. Voilà pourquoi nous allons
rapporter à ce sujet ce qui éclaire ces questions et les dévoile, si
Allâh le veut.
Tout
d'abord, il faut savoir qu'il y a eu divergence sur
la nature de Hârut et de Mârut ; Sont-ils deux Anges ou deux êtres
humains ? [Si ils sont des Anges], sont-ils les deux Anges visés [dans
ce verset] ? Doit-on lire « malakayn – deux
Anges » ou bien « malikayn – deux rois » ? Est-ce que le « mâ » dans
les deux Paroles Divines du verset 102 de la Sourate Al Baqarah :
« ce qui (mâ) est descendu aux deux anges Hârut et Mârut, à Babylone », « Cependant, ceux-ci n'enseignaient rien à personne (wa mâ yu'allimâni min ahadin... » est une particule affirmative ou bien de négation ?
La
plupart des exégètes considèrent qu'Allâh (qu'Il soit
exalté) a éprouvé les hommes par deux Anges qui auraient enseigné la
sorcellerie et l'expliquaient, car la sorcellerie est de la mécréance.
Ainsi, celui qui apprenait la sorcellerie mécroyait et
celui qui l'abandonnait croyait, car ces deux Anges disent dans le
Qur°ân : « Nous ne sommes qu'une tentation, ne soit donc pas mécréant »
[Sourate 2 – Verset 102].
Donc leur enseignement aux hommes relèveraient d'une instruction pour
les avertir, c'est-à-dire qu'ils disaient à celui qui vient pour acquérir cette sorcellerie : « Ne
la pratique pas, car elle sépare le mari de sa femme et ne recours pas à
la magie
comme une machination, car ceci est de la sorcellerie, évite donc la
mécréance ! » De cette manière, l'œuvre des deux Anges relèverait de
l'obéissance et leur attitude dans ce qui constitue
un ordre pour eux n'est pas une désobéissance. Ce serait ainsi
uniquement une tentation pour les gens.
Ibn
Wahb rapporte également sur cela qu'on a évoqué en la présence de
Khâlid Ibn Abî 'Imrân le cas de Hârut et Mârut en disant qu'ils
enseignaient la sorcellerie, il dit alors : « Nous les innocentons (les
Anges en général) d'une telle pratique. » Et
quelqu'un parmi ceux qui étaient présent lu alors le verset de cette
manière : « wa unzila 'alal malakayn – et ce qui a été révélé aux deux
Anges » en omettant la particule
« mâ », mais Khâlid corrigea en disant : « wa mâ unzila - il ne leur
a pas été révélé ».
Donc,
voici Khâlid qui, avec sa notoriété et sa science, innocente deux
Anges de pouvoir enseigner la sorcellerie bien que d'autres estiment
que ceci leur est permis à la seule condition d'expliquer aux gens que
c'est une mécréance et une épreuve de la part d'Allâh.
Mais alors, comment, dans de telles conditions, ne les
innocent-t-ils pas des péchés majeurs et de la mécréance évoqués dans
ces histoires ?!
L'expression de Khâlid : « Il ne leur a pas été révélé – wa mâ
unzila » signifie que le « mâ » est ici une particule de négation. Et ceci constitue d'ailleurs la position de Ibn 'Abbâs.
Et
de son côté, Al Makkî dit que tout ceci revient à dire : « Sulaymân n'a
pas
mécru, c'est-à-dire qu'il n'a pas mécru en pratiquant la sorcellerie
inventée par les démons, qui furent suivis en cela par les juifs, et
que cela n'a jamais été révélé à deux Anges (wa mâ unzila
'alal malakayn). »
Pour
Al Makkî, ce sont Jibrîl et Mikâ°îl que les juifs accusent d'avoir
apporté la
sorcellerie, de la même manière qu'ils accusèrent Sulaymân de cela.
Mais Allâh les a alors démentis à ce sujet. On a dit aussi que Hârut et
Mârut sont deux hommes qui apprirent la sorcellerie et
que ce sont donc les démons qui ont mécru en enseignant la magie aux
hommes que sont Hârut et Mârut de [la ville] de Babylone.
De son côté, Al Hasan [Al Basrî] a dit que Hârut et Mârut étaient deux non-Arabes parmi les habitants de Bâbil. Il a ainsi lu
: « wa mâ unzila 'alal malikayn – et ce qui a été révélé aux deux rois » au lieu de malakayn (les deux Anges).
Selon cette lecture, le « mâ » est une particule affirmative.
C'est également la lecture retenue par 'Abd Ur Rahmân
Ibn Abza sauf qu'il a identifié les deux rois comme étant ici Dâwud et
Sulaymân. Selon ce dernier avis, le « mâ » est alors ici une particule
de négation. Et As Samarqandî rapporte qu'il s'agirait plutôt de
deux rois parmi les Banî Isrâ°îl qu'Allâh avait rabaissés (et donc que
le « mâ » est une particule affirmative).
Cependant, la lecture qui retient le terme « al malikayn » est
plutôt rare.
Pour conclure, l'interprétation du verset selon ce qui a été retenu par Abû
Muhammad Al Makkî
reste la bonne car elle innocente les Anges, les débarrasse de toute
souillure et les purifie. D'autant plus qu'Allâh les a
qualifiés par les termes : « mutahharûn - purs », « kirâm -
nobles », « barakât - bénis », « qui ne désobéissent point à l'ordre
d'Allâh. ». »
Et nous refusons également catégoriquement l'interprétation faisant de ces deux
êtres des Anges. Comme l'a si bien dit l'Imâm Abû 'Abdi Llâh Muhammad Al Qurtubî Al Ansârî (qu'Allâh lui
fasse miséricorde) dans son Tafsîr intitulé Jâmi' lî
Ahkâm Il Qur°ân : « Tout
ce qui a été rapporté à ce sujet est faible et très loin de Ibn 'Umar
et
des autres. Rien de tout cela n'est authentique. C'est assurément
une parole que les fondements [de la croyance] envers les Anges, qui
sont les sincères dépositaires d'Allâh (umanâ°u Llâh) de Sa
révélation et Ses ambassadeurs (sufarâ°) envers les Messagers,
réfutent. « Ils ne désobéissent point à ce
qu'Allâh leur commande et font strictement ce qu'Il leur ordonne. » [Sourate 66 – Âyah 6]
; « Ils sont des serviteurs honorés qui ne prennent pas la parole avant Lui et n'agissent que sur Ses
ordres. » [Sourate 21 – Versets 26 et 27] ; « Ils L'exaltent nuit et jour, sans relâche. » [Sourate 20 – Verset 21]... »
Et Al Imâm Abû 'Abdi Llâh Muhammad Al
Qurtubî Al Ansârî (qu'Allâh lui fasse miséricorde) a dit aussi dans le 15ème point du commentaire
de ce verset :
« Ici, le « mâ » est négatif et non un
pronom relatif. Cela (le verset) est dut au fait que les juifs avaient dit : « Certes, Allâh a révélé la sorcellerie à Jibrîl et
Mikâ°îl », Allâh a alors nié
cela. Dans cette parole, on a avancé ce qui aurait dut être
[généralement] en retrait. Donc la phrase a le sens suivant :
« Sulaymân n'a pas mécru et cette chose (la sorcellerie) n'a pas été
révélée aux deux Anges. Ce sont plutôt les shayâtîn
qui ont mécru. Ils
enseignaient aux hommes la magie dans la ville de Bâbil, [et parmi
eux se trouvaient] Hârut et Mârut. » Hârut et Mârut sont les shayâtîn qui
sont nommés dans Sa Parole : « Ce sont plutôt les shayâtîn qui ont
mécru ».
Ceci
est la meilleure interprétation de ce verset que l'on peut trouver
et elle est la plus authentique par rapport à tout ce qui a été dit à
ce sujet. Et aucune autre interprétation ne doit faire l'objet d'une
quelconque attention.
La sorcellerie vient des shayâtîn
à cause de la finesse de leur substance et de la subtilité de leur
compréhension [dans ce domaine]. Et la plupart de ceux qui la pratique
parmi les
humains sont d'ailleurs les femmes, et particulièrement lorsque
elles ont leurs règles ; d'ailleurs, Allâh (qu'Il soit exalté) a dit : « Et contre le mal
de celles qui soufflent sur les nœuds » [Sourate 113 – Verset 4].
Et le poète a dit : « Je recherche la protection auprès de mon
Seigneur contre celles qui soufflent... ». »
Quant à l'histoire de ce verset, la voici :
Al Imâm Rabî' Ibn Anas (qu'Allâh lui fasse miséricorde) a dit : « Il
y eut une période pendant laquelle, chaque fois que les juifs
interrogeaient le Prophète sur un point de la Thora, Allâh faisait
descendre un verset qui lui
permettait de leur répliquer. Voyant cela, ils en arrivèrent à dire :
« Celui-là est plus savant que nous-mêmes sur ce qui nous a été
transmis ! ». Ils décidèrent alors de l'interroger
sur la sorcellerie et de débattre avec lui sur ce sujet. Alors,
Allâh révéla le verset : « […] et ils suivent les textes dictés par les démons
à propos du règne de Sulaymân […] ». » [Tafsîr At Tabarî].
Et l'Imâm 'Abd Ul Mâlik Ibn Jurayj (qu'Allâh lui fasse miséricorde) a dit : « Les shayâtîn enseignèrent la sorcellerie aux juifs au temps du règne de Sulaymân et c'est après ce
règne qu'ils s'adonnèrent (massivement) à cette sorcellerie. » [Tafsîr At Tabarî].
Et l'Imâm Ismâ'îl As Suddî (qu'Allâh lui fasse miséricorde) précisa :
« [A l'époque de Sulaymân], les shayâtîn
accédaient à des endroits du ciel où ils pouvaient entendre les propos
des Anges sur ce qui surviendraient plus tard sur terre […]. Ils
transmettaient
ensuite ces propos aux devins qui les révélaient ensuite aux gens.
Une fois que les devins eurent constaté que ces choses se réalisaient et
qu'ainsi leur confiance à l'égard des shayâtîn
était bien confortée, ceux-ci commencèrent à leur mentir en
introduisant des propos qu'ils n'avaient pas du tout entendus, au point
d'ajouter à chaque mot
véridique 70 mots supplémentaires. Or, les hommes consignaient ces
propos dans des écrits et le bruit se répandit parmi les Banî Isrâ°îl
que les jinns connaissaient le monde invisible (al
ghayb).
Sulaymân
envoya alors des émissaires dans le peuple afin qu'ils
réunissent tous ces récits. Lorsque cela fut terminé, il plaça ces
textes dans un coffre qu'il fit enterrer sous son trône, et aucun démon
ne pouvait alors s'en approcher sans être aussitôt
consumé. Sulaymân avertit alors que quiconque prétendrait que les
jinns connaissent le monde invisible (al ghayb) serait mis à mort.
Après
sa mort et une fois que tous les savants qui
connaissaient cette affaire moururent, satan se présenta sous
l'aspect d'un être humain à un groupe des Banî Isrâ°îl et leur dit : « Je vais vous
indiquer un trésor que vous n'épuiserez jamais ! »
Ils lui répondirent : « D'accord
! »
Il dit : « Creusez donc sous le trône [de Sulaymân]. »
Il
s'y dirigea alors avec eux, et, tout en restant à
l'écart (afin de ne pas être consumé), leur indiqua l'endroit où ils
devaient creuser. [Comme ils s'étonnaient de son attitude], ils lui
demandèrent pourquoi il ne s'approchait pas. [Il esquiva
leur question en disant] « Je suis ici entre vos mains, si vous ne trouvez rien, alors tuez moi ! »
Ils creusèrent et trouvèrent les textes en question.
Satan leur dit alors : « C'est par cette sorcellerie [consignée dans ces textes] que Sulaymân exerçait son influence sur les hommes, les diables et les
oiseaux. »
Et c'est ainsi que se répandit parmi les Banî Isrâ°îl l'opinion selon
laquelle Sulaymân aurait été un sorcier, et les Banî Isrâ°îl conservèrent ces écrits jusqu'à l'arrivée de Muhammad (que Le Salut et La Paix
d'Allâh soient sur lui) et s'en servirent pour controverser avec lui […] » [Tafsîr At Tabarî].
Telles sont donc les principales connaissances à acquérir à propos de ce verset, que nous
traduirons donc comme suit :
« Et
ils suivirent ce que les diables racontent à l'encontre du
règne de Sulaymân. Alors que Sulaymân n'a jamais été mécréant (mâ
kafara Sulaymân), ce sont plutôt les diables Hârut et Mârut qui
l'étaient : ils enseignaient la sorcellerie aux gens, et cette
dernière n'a jamais été descendue sur les deux Anges [Jibrîl et
Mikâ°îl] (wa mâ unzila 'alal malakayn) à Babylone. Cependant, ceux-ci
n'enseignaient rien à personne sans qu'ils n'aient dit
d'abord : « Nous ne sommes rien d'autre qu'une tentation : ne soit
pas mécréant » ; ils (les gens) apprenaient auprès d'eux ce qui sème la
désunion entre l'homme et son épouse. Or ils
ne sont capables de nuire à personne si ce n'est avec la permission
d'Allâh. Et les gens apprennent ce qui leur nuit et ne leur est pas
profitable. Et ils savent très certainement que celui qui
acquiert [ce pouvoir] n'aura aucune part dans l'au-delà. Quelle
détestable marchandise pour laquelle ils ont vendu leurs âmes ! Si
seulement ils savaient
! »
Et nous conclurons par cette invocation tirée du Coran :
رَبَّنَا لاَ تُزِغْ قُلُوبَنَا بَعْدَ إِذْ هَدَيْتَنَا وَهَبْ لَنَا مِن لَّدُنكَ رَحْمَةً إِنَّكَ
أَنتَ الْوَهَّابُ
« Rabbanâ lâ tuzigh qulubanâ ba'da idh hadaytanâ wa hab lanâ
min~ladunka rahmatan, innaka antal wahhâb – Ô notre Seigneur ! Ne détourne pas nos cœurs après nous avoir guidé, et répand Ta miséricorde sur
nous, car Tu es certes Le Dispensateur de toute grâce (Al Wahhâb) ! »
[Sourate 3 – Verset 8]
Sumber
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